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08 août 2011

L'effet Lazare

science-fiction, frank herbertTroisième tome du cycle « Le Programme conscience » coécrit par Frank Herbert et Bill Ransom, L’effet Lazare nous projette un peu plus de trois cents ans après les événements racontés dans L’incident Jésus.

Nef, l’intelligence artificielle aux capacités quasi-divines, est parti en laissant la nouvelle humanité à son propre sort. Mais en colonisant durablement Pandore, les clones et les mutants puis leurs descendants, ont détruit le varech.

Cette espèce végétale aquatique qui incarnait l’Avata, l’esprit unique et supérieur qui anime la vie sur Pandore, régulait aussi la force des océans. Sa disparition a entrainé l’immersion progressive de tous les continents et la scission de l’humanité.

Les Iliens, essentiellement composés des mutants, vivent précairement en surface sur d’immenses radeaux organiques. Les Siréniens, à l’apparence plus « humaine », vivent confortablement dans les profondeurs des mers et disposent de technologies avancées.

Les Iliens abritent Vata, la fille mutante de Panille et du varech, qu’ils vénèrent, et opèrent un contrôle des naissances. Les Siréniens tentent de recréer un varech pour réguler les forces de l’océan et reconstituer des terres émergées. Les deux communautés tentent de coexister sur une Pandore toujours hostile.

Mais Gallow et ses sbires siréniens projettent d’annihiler les Iliens et de créer une nouvelle société. Brett, Twisp, Keel - des Iliens- et Scudi, Panille, Kareen - des Siréniens - vont devoir faire fi de leurs différences culturelles et physiques s’ils veulent sauver les deux communautés et recréer le varech Avata.

Dans ce troisième roman, on se penche sur la conscience « supernaturelle », capable d’animer tout un écosystème vivant et partant, de relier tous les êtres humains. L’Avata devient dès lors une nouvelle divinité, capable de constituer une conscience humaine collective.

On ne retrouve ni la dimension scientifique de Destination Vide, ni la dimension mystique de L’incident Jésus (enfin si, un peu à la fin). Le roman m’a semblé beaucoup plus tourné vers la description des deux communautés et l’action des personnages. Le début est un peu lent mais une fois le cadre posé, on ne peut plus décrocher.

Le mode de vie des Iliens dans un monde d’eau m’a fait un peu penser au film Waterworld de 1995 avec Kevin Costner. Le livre marque par son interrogation sur ce qu’est l’humanité, au travers les différences pensées et vécues entre les « mutards » et les « normaux ». C’est toute la question du respect de l’autre, et du rapport aux apparences et aux différences.

03 août 2011

L'incident Jésus

L'incident Jésus.jpegIl s’agit du deuxième tome du cycle « Le Programme conscience », écrit par Frank Herbert et Bill Ransom. L’histoire se déroule quelques siècles après les événements racontés dans Destination Vide. Nef, l’intelligence artificielle créée par l’équipage du vaisseau spatial Terra, a télé-transporté le vaisseau vers la planète Tau Ceti, désormais rebaptisée Pandore.

La nouvelle colonie humaine, issue du clonage et de la reproduction des milliers d’hommes et de femmes mis en hibernation, se développe entre le vaisseau Terra et  quelques campements retranchés sur Pandore. On y vénère Nef comme un Dieu. Maitrisant une autre dimension de l’espace-temps, gardien du savoir et de l’histoire humaine, Nef a le pouvoir de s’immiscer dans la conscience de tout être humain.

Constituée essentiellement de vastes océans, Pandore abrite de nombreuses espèces vivantes qui viennent menacer (au moins en apparence) et limiter le développement des colonies humaines. Mais toutes ces espèces semblent animées par une force supranaturelle, unique et supérieure, l’Avata.

Morgan Oakes, le psychiatre-aumônier, entend bien s’affranchir de la tutelle de Nef. A l’aide d’une armée composite de clones humains, crées par Louis Jésus l’ingénieur génétique, il se lance dans la conquête de Pandore, pour y construire une forteresse à partir de laquelle il pourra détruire Nef.

Nef sort Flatterie, le psychiatre-aumônier qui a contribué à sa création, de sa capsule d’hibernation et le charge de trouver avec les humains une manière de le vénéfrer, sous peine de quoi l’humanité sera détruite. Il sera pour cela accompagné du poète Panille, le seul humain capable de communiquer avec l’Avata, et partant de percer le mystère de Pandore.

Le contraste avec Destination Vide est aussi saisissant que désappointant : espace clos contre planète vaste, un équipage de quatre personnes contre une douzaine de personnages principaux, un jargon technique et scientifique contre une ambiance religieuse ou mystique. Le contraste se retrouve également dans le projet des personnages : des humains veulent créer une intelligence artificielle dans l’un, une conscience artificielle veut faire accéder des clones et mutants au rang d’humanité dans l’autre.

Sérieuses ressemblances ou simples projections de ma part, j’ai trouvé qu’il y avait comme des similitudes entre l’univers d’Avatar (le film) et celui de L’incident Jésus, sans pour autant réellement correspondre. Du reste, j’avais eu un peu la même impression à la lecture de quelques passages de Et l’homme créa un Dieu.

On retrouve la aussi les thèmes chers à Frank Herbert : la psychologie, la religion, le clonage, la mémoire, la préscience, le pouvoir. Mais ce qui est fascinant c’est que la façon dont ils sont traités ici, complète ou explicite, sans le vouloir, quelques aspects de Dune (le voyage spatial, la mémoire des clones, l’avenir de l’humanité pressentie par une intelligence supérieure etc).

20 juillet 2011

Destination Vide

science-fiction, frank herbertL’œuvre littéraire de Frank Herbert ne se résume pas à l’incroyable saga de Dune, dont j’ai plusieurs fois fait mention sur ce blog. Il est en effet l’auteur d’une autre saga, intitulée « Le Programme conscience », qu’il a initiée seul avec Destination Vide et qu’il a continuée et finalisée, dans trois autres ouvrages, avec Bill Ransom.

Transportant des milliers d’humains mis sous cryogène, le vaisseau spatial Terra est en route pour Tau Ceti, une planète située dans une autre galaxie. Mais les cerveaux humains incorporés à l’ordinateur de bord et chargés d’assurer le voyage, lâchent les uns après les autres.

Livrés à eux-mêmes, quatre astronautes – Bickel le capitaine, Timberlake l’ingénieur, Flatterie le psychiatre-aumônier, Prudence la médecin – n’ont pas d’autre choix que de construire une intelligence artificielle, une conscience, pour assurer le voyage censé durer 400 ans.

En réalité toutes les anomalies de l’astronef ont été prévues par Hempstead et ses hommes qui supervisent depuis la Lune, le Programme conscience. Aucun retour sur Terre n’est possible. Et sans l’intelligence artificielle, le voyage sera de courte durée (problèmes de vivres et d’espérance de vie).

Voilà les quatre astronautes dérivant dans le vide, « la substance brute à partir de laquelle on peut tout créer ». Entre discussions scientifiques et techniques pour créer l’intelligence artificielle et débats métaphysiques sur la notion et les risques d’une conscience artificielle indépendante, ils doivent œuvrer pour leur survie.

Destination vide est une sorte de huis clos spatial. La lecture du roman est rendu difficile par la surabondance des raisonnements, termes et concepts scientifiques et techniques. C’est typiquement de la « hard science fiction ». L’intérêt du livre réside dans le débat métaphysique et moral qui entoure le projet d’une I.A consciente et indépendante à laquelle on délaisse sa liberté, et qu’anime le psychiatre-aumônier entre les personnages.

30 mai 2011

Et l’homme créa un dieu

science-fictionPour tous ceux qui ont découvert le talent et le génie de Frank Herbert par la saga Dune, et qui sont tombés amoureux de cet univers, il convient de dissiper d’entrée tout malentendu lié à la première page de couverture. Bien que sous-titré Prélude à Dune, Et l’homme créa un dieu n’a pas de liens directs avec cet univers. On retrouve cependant les thèmes chers à Frank Herbert.

Marqué par une lointaine et mystérieuse Guerre des Marches, la galaxie s’assure l’unité et la paix entre civilisations par les services Redécouverte et Rééducation (le R.R), chargé de redécouvrir les planètes autrefois affiliés à l’Empire et d’y enseigner la paix civile, et Investigation et Normalisation (l’I.N), chargé d’employer la manière forte en cas de menaces guerrières avérées.

L’histoire se centre sur le personnage de Lewis Orne, agent R.R tout juste diplômé de l’Ecole de la Paix, et envoyé sur une planète récemment redécouverte et où l’on enregistre de nombreuses disparitions. L’homme semble des plus banals mais abrite en lui une sorte de pouvoir de préscience, faisant preuve d’un sens aigue de l’observation et d’immenses capacités d’intuition.

Plus ou moins supervisé par Stetson, un agent de l’I.N convaincu de son potentiel, Lewis Orne va mener plusieurs missions suicides pour assurer la paix, et déjouer le contre-pouvoir des Nathians. Ses grandes capacités et son expérience de quasi mort imminente l’assimilent à un « faiseur de miracles », un « dieu en puissance », aux yeux des Prêtres du Surdieu. Seules les épreuves finales permettront de déterminer qui il est réellement.

Plutôt court, le roman se lit assez rapidement d’autant plus que le style est ici accessible. Rien à voir avec Destination Vide, un autre roman de Frank Herbert dont j’aurai l’occasion de reparler, où le jargon scientifique égare le lecteur. Le livre ouvre la réflexion sur la relation entre religion et pouvoir, entre créateur et créature, entre paix et guerre, et sur les potentialités de la conscience humaine. On en revient à la notion de post-humanité dont j’avais parlé l’été dernier.

L’intrigue est moins complexe que celle de Dune. Les défis rencontrés par Lewis Orne apparaissent comme des étapes dans la trajectoire personnelle du héros, montrant une progression du personnage du statut d’homme banal à celui de surhomme. Ici c’est moins l’environnement que le personnage qui compte, à la différence de Dune. Mais cela n’enlève rien à la qualité de l’histoire et de la narration. Et c’est avec plaisir que j’ai relu Frank Herbert.

19 avril 2011

La genèse de Dune

A la fin des années quatre-vingt-dix, Brian Herbert et Kevin J. Anderson décident de se lancer dans l’écriture d’une suite de la mythique saga Dune, laissée inachevée par le décès de Frank Herbert en 1986. Mais au lieu d’attaquer directement l’écriture du septième tome, soit la suite de La Maison des Mères, les deux auteurs ont choisi de revenir sur les prémices de la saga.

Dans La Genèse de Dune, leur deuxième trilogie après Avant-Dune, le binôme explique les événements du Jihad Bultérien, la guerre des hommes contre les machines, à l’origine de l’univers politique et économique de Dune. Dans le livre fondateur de la saga, Frank Herbert avait laissé quelques indices sur ces événements déjà millénaires.

Dans ce temps là, les voyages interstellaires sont encore technologiquement limités, l’Epice n’est pas la ressource centrale de l’univers, et les principales institutions connues de la série ne sont pas encore formées. Une partie de l’univers – les mondes synchronisés – est sous la domination des machines d’Omnius, une super intelligence artificielle présente par copies sur toutes les planètes dominée.

Les hommes y sont réduis en esclavage, surveillés par des automates mais aussi les Cymeks, des cyborgs géants abritant un cerveau humain dans des corps mécaniques, alliés d’Omnius. Agamemnon Atréides en est le chef. Vorian, son fils, un humain, assure la remise à jour des copies d’Omnius d’un monde à l’autre. De l’autre côté, les mondes de la Ligue des hommes regroupent les planètes encore libre de la tyrannie des machines. Entre les deux, des planètes dissociées, ni acquis aux robots, ni ralliés aux humains, parmi lesquelles on retrouve Arrakis, la planète des sables.

L’histoire racontera alors cette guerre séculaire entre les humains et les machines, le Jihad Bultérien, du nom de celle qui l’initiera malgré elle. On en apprend plus sur la voyage des Zensunnis, le futur peuple Fremen, la découverte des propriétés de l’Epice, les origines de la Guilde, du Bene Gesserit, des Mentats et de l’Empire des Corino. On découvre pourquoi les Atréides et les Harkonnen finissent par se vouer une haine sans limite.

J’avais lu les deux premiers livres en 2005 et 2006. J’ai terminé le dernier tome il y a quelques semaines. Je ne renouvellerai pas mes remarques sur le style et le schéma narratif des auteurs, rien de nouveau à ce sujet. J’ai trouvé qu’il y a beaucoup de personnages, avec des noms peu mémorisables, qui ont un rôle trop secondaire dans l’intrigue. Du coup beaucoup d’autres personnages manquent de personnalité et de profondeur.

Enfin, alors qu’on connaissait dans les six premiers tomes, les Atréides comme des Justes et les Harkonnens comme des Montres, j’ai trouvé original de faire comme une inversion de situation. L’acte de couardise attribué aux Harkonnens, et à l’origine de leur haine pour les Atréides, en dit beaucoup sur la « raison d’Etat » et la justice du vainqueur. Le héros n'est pas toujours celui qu'on croit.